Dossier bad n19

Comprendre la fente du joueur de badminton

Il est communément admis que l’activité physique a des vertus pour la santé. Mais la pratique du badminton n’est-elle pas dans certains cas en contradiction avec cette finalité ? Il est aisé de remarquer par simple observation visuelle les différences de volume musculaire entre les cuisses d’un même joueur de badminton. Si l’on rentre un peu plus dans le détail, on remarquera également des hypercyphoses thoraciques, des rotations antérieures de l’épaule et des relâchements de l’abdomen accompagnés d’hyperlordoses lombaires. Autant de signes précurseurs ou à l’origine de certaines pathologies. Par exemple, quel entraîneur n’a jamais eu un joueur se plaignant de mal de dos ? Sachez que ce dernier avait sans doute l’un des signes visuels énoncés plus haut. Ces modifications corporelles et posturales peuvent être le produit de la pratique du badminton et la fente y est en partie pour quelque chose. La fente et la frappe sont les deux mouvements à l’origine de l’asymétrie du joueur de badminton. De plus, ils se combinent parfaitement pour augmenter les déséquilibres tel un cercle vicieux. Nous allons donc aborder différents types de fentes ainsi que leurs conséquences sur la performance et l’intégrité physique.

Les différents types de fente

Nous allons analyser brièvement différents types de fente et tenter de mieux cerner les mécanismes sous-jacents. Bien sûr, cette « classification » ne tend pas à ranger les joueurs dans des cases. Il s’agit ici d’observables permettant de donner des axes de travail et non de prôner une méthode d’apprentissage dite du modèle. Retenons que chacun est différent et que donc chacun a sa propre manière de faire une fente. Néanmoins, certains principes anatomiques et biomécaniques sont sensiblement les mêmes pour tout le monde et rappelons-nous que le feeling du joueur ne fait pas toujours bien les choses. C’est pourquoi il est parfois judicieux de modifier certaines programmations motrices pour améliorer la performance et/ou pour préserver l’intégrité physique. Voici trois manières de faire une fente :

La fente en quadriceps

Il s’agit d’une fente avec une attaque par le médio-pied de la jambe avant, voire par l’avant du pied. Ainsi, le freinage est effectué en grande partie par les quadriceps. Ce type de fente est violent avec un freinage très bref voire parfois accompagné d’une glissade ou de plusieurs pas de freinages sur la jambe avant. Le genou a tendance à dépasser la pointe du pied ce qui ne pose pas de problème lorsque l’on est accroupi sans aucune charge additionnelle (nos ancêtres se déplaçaient de cette façon…), mais cela est très différent lorsque l’on s’arrête quasiment sur une seule jambe avec une certaine vitesse initiale… ! Le joueur aura tendance à ne pas chercher beaucoup d’amplitude dans cette fente du fait de sa violence, du peu de groupes musculaires qui y participent et de la faiblesse de ses ischios-jambiers en contraction excentrique (allongement du muscle + contraction). La stabilité pourra aussi pêcher du fait de la répartition du poids du corps sur l’avant-pied et aussi de la violence du freinage. L’autre inconvénient qui est le plus important à notre avis, sera l’augmentation du déséquilibre entre les ischios-jambiers et les quadriceps. Le joueur de badminton utilise déjà énormément ses quadriceps lors des différents rebonds et sauts. Les fentes sont les moments pour lui de solliciter aussi ses ischios-jambiers… De plus, les joueurs qui utilisent cette fente le font certainement parce qu’ils sont déjà plus forts sur les quadriceps que sur les ischios-jambiers. Le joueur veut être le plus efficace possible, il utilise donc ses zones fortes, augmentant ici des déséquilibres existant au préalable.

La fente en dos

Il s’agit d’une fente où le joueur va « ramasser en dos » pour utiliser un terme issu des sports de force. Le joueur va ainsi s’avachir sur sa jambe avant, soulageant le membre inférieur au détriment des érecteurs du rachis (lombaires). Les joueurs qui pratiquent cette fente ont adapté le mouvement de fente en fonction de leur force, c’est-à-dire en utilisant préférentiellement les érecteurs du rachis. Cette fente traduit une faiblesse au niveau des membres inférieurs et aussi au niveau abdominal. Oublions le travail de gainage postérieur pour ceux-ci au profit d’un renforcement abdominal drastique et d’un apprentissage du freinage en fente sur des angulations basses. Le travail abdominal permettra également aux joueurs dans ce cas de figure d’améliorer leur posture par un meilleur maintien de l’abdomen. Pour aller plus loin, il faudra mettre en place des exercices de corrections posturales pour lutter contre la projection avant de la tête, la rotation avant des épaules et la cyphose thoracique.

La fente en chaîne postérieure

Il s’agit d’une fente où le joueur attaque le sol par le talon avec la jambe avant tendue et le tronc légèrement penché vers l’arrière. Il s’agit en fait de produire un alignement talon-genou-bassin-épaule de façon à être dans la meilleure position pour absorber le choc du talon et freiner le plus possible la pose du pied, la flexion du genou et la chute du tronc. Vous l’aurez compris, il s’agit de la fente avant parfaite quasi-impossible à reproduire sur un terrain de badminton. Néanmoins, il est intéressant de travailler cette posture pour faire de la reprogrammation motrice au niveau de la chaîne postérieure. En effet, en travaillant cette fente sans volant en début de séance jusqu’à fatiguer les zones de travail, puis en refaisant des fentes en situation sur le terrain, vous augmenterez la sensibilité des zones fatiguées les rendant ainsi plus actives dans la pratique. Vous pourrez à terme modifier la programmation motrice lors de l’exécution d’une fente de vos joueurs. Il est courant de parler de l’attaque talon dans le monde du badminton lors de l’exécution d’une fente, mais celle-ci est insuffisante dans une optique d’équilibration des chaînes antérieures/postérieures et autour de l’articulation du genou.

Conclusion

Ce Dossier BAD a tenté d’aborder la fente de manière simplifiée en recentrant le débat sur la fente avant et dans un objectif d’augmenter sa rentabilité, son efficacité et l’équilibre corporel. Bien entendu, nous aurions pu différencier la fente « haute » en position favorable de la fente extrême en situation défavorable. De même, les fentes latérales et arrières présentent également des particularités au niveau biomécanique particulièrement intéressantes à décrire et indispensables à la mise en place d’une construction motrice raisonnée. Même si les programmations motrices peuvent être modifiées à tous âges, ce travail sera très payant sur le long terme chez les jeunes et leur évitera surtout des traumatismes aigus et/ou chroniques potentiellement handicapant dans leur pratique comme dans leur vie future.
Gardons en tête deux points essentiels :

  • Le premier est que si le badminton n’est pas le meilleur sport pour préserver ou améliorer sa santé, cela dépend uniquement de la manière dont on le pratique. La manière « naturelle » de chacun à faire une fente avant en fait partie.
  • Le deuxième point à retenir est que la recherche de performance en badminton n’est pas forcément corrélée à une détérioration de l’intégrité physique et mentale. Lorsque l’on part de ce postulat et qu’on analyse la biomécanique de la fente en badminton, on remarque que la recherche d’une fente équilibrée rime avec la production d’une fente performante. Il serait donc dommage de s’en passer.

Bon entraînement intelligent à tous !

Maxime Michel
DESJEPS Badminton
Préparateur physique

Philippe Michel
Professeur Agrégé EPS

 

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