Dossier bad n14

La communication entraîneur-joueur lors d’une compétition de badminton : vers un nouvel état d’esprit 

Le sujet de ce Dossier BAD, relatif à la psychologie ergonomique dans le domaine du sport, peut surprendre lorsqu’on le compare aux autres thèmes qui ont été traités jusqu’alors. Il s’agit ici d’un sujet que j’ai investigué lors de mon parcours STAPS et de mon Master Sport, Expertise et Performance de Haut-Niveau, puis que j’ai revisité dernièrement pour mener à bien ce Dossier BAD.

La communication est un outil crucial en sport et notamment en badminton. Pourtant, la manière de communiquer au briefing, au cours du coaching et au débriefing repose sur peu de connaissances, et rares sont les dyades (joueur-entraîneur) ayant co-construit leur communication. En effet, les habiletés en matière de communication, par exemple l’aptitude à gérer les conflits, vont peut-être de soi pour les entraîneurs et les joueurs, mais il est indéniable que ces processus sont essentiels au succès de n’importe quelle relation entraîneur-joueur. Communiquer au coaching notamment, va au-delà de transmettre des informations avec éloquence et d’une manière organisée. Les données reçues ne sont pas forcément des données reçues se traduisant ensuite par des actes (Cox, 2012). Coacher va bien au-delà de remédier à des techniques ou à des intentions tactiques. Les interventions basées sur des preuves empiriques sont absolument nécessaires (Jowett, Lavallée, 2008). L’expertise en matière de communication est aussi importante pour le succès d’une relation entraîneur-joueur et le bien-être des protagonistes que le savoir-faire technique et les connaissances de l’entraîneur. La communication est donc l’outil de développement de la relation entraîneur-joueur. Si l’intervention du coach en match peut aider les athlètes à donner le meilleur d’eux-mêmes, celle-ci peut parfois bloquer leurs prestations (Sordello, 2004). Le joueur et l’entraîneur cherchent à communiquer afin d’avoir un avantage par rapport à leur adversaire… Plus facile à dire qu’à faire.

La communication doit être co-construite :

L’entraîneur et le joueur lorsqu’ils communiquent, sont plus ou moins « sur la même longueur d’onde ». On parle alors de convergence. Trois types de convergences entre les cours d’actions individuelles de l’athlète et de l’entraîneur ont été identifiés (Arripe-Longueville, 2002) :

  • Une convergence immédiate observée dans les séquences où l’engagement de l’entraîneur et de l’athlète porte d’emblée sur un même élément de la situation.
  • Une convergence construite après négociation (par exemple l’analyse d’une contre-performance).
  • Une convergence illusoire caractérisée par des non-dits et un accord apparent cachant des interprétations différenciées de la situation.

L’activité du joueur consiste en une alternance entre autonomie (recherche individuelle de solutions) et coopération (recherche d’aide auprès de l’entraîneur), mais aussi par la conservation d’un espace de non-dits. La coordination entre les messages transmis de l’entraîneur et de l’athlète et leurs interprétations respectives n’est pas donnée a priori mais relève d’une co-construction. Cette coordination nécessite donc une compréhension intersubjective. L’intersubjectivité étant l’idée que les hommes sont des sujets pensants capables de prendre en considération la pensée d’autrui dans leur jugement propre. L’entraîneur devrait donc prendre en considération ce que pense l’athlète afin de fonder son propre jugement et ainsi coordonner les messages et leurs interprétations. Réciproquement, l’athlète devrait faire de même. Bien évidemment, cela ne va pas de soi, de la même manière qu’un débutant ne réalise pas d’emblée un spin sur la bande du filet. La co-construction de la communication entraîneur-joueur relève d’une expertise forgée par l’entraînement.

Quelle est l’activité de l’entraîneur ?

Au cours du coaching, l’activité de l’entraîneur consisterait à créer chez l’athlète les conditions de réceptivité, à analyser le rapport de force, à délivrer des consignes adaptées au joueur et à la situation, et à motiver le joueur (Legrain, Arripe-Longueville, 1999). De plus, dans certaines disciplines comme le badminton, le joueur n’est pas toujours dans un état propice pour communiquer efficacement (FC élevée, fatigue mentale, musculaire, contexte…). Cela peut poser un problème de réceptivité chez le joueur mais aussi d’émission de message. Le temps et l’énergie consacrés à l’attention vis-à-vis des consignes n’est pas consacré à la récupération. Cette dernière est plus efficace si le joueur se focalise dessus. L’entraîneur doit donc veiller à ce que le joueur soit en état de recevoir des messages mais aussi de bien récupérer. De plus, la communication en compétition est le plus souvent unidirectionnelle, c’est-à-dire allant de l’entraîneur vers le joueur. En effet, le joueur aurait beaucoup plus accès à la cognition de l’entraîneur que l’entraîneur n’aurait accès à celle du joueur. Cela suggère que le joueur et l’entraîneur apparaissent comme une équipe « asymétrique ». L’entraîneur donnerait d’avantage d’informations au joueur que le joueur n’en donnerait à l’entraîneur. Les feedbacks de l’entraîneur liés aux causes possibles du comportement du joueur permettent à ce dernier de mieux comprendre les raisons d’un évènement particulier et d’envisager des éléments pour y remédier. Or, comme l’ont montré Lorimer et Jowett (2010), des feedbacks précis du joueur amélioreraient probablement leur compréhension conjointe des situations. L’entraîneur devrait également tenir compte de l’état émotionnel du joueur vis-à-vis du contexte du match et de la compétition (le score, l’arbitrage, le public…) pour adapter ses interventions de manière pertinente.

Les stratégies de communication :

Les stratégies de communication joueur-joueur ont été étudiées en tennis (Lausic et al, 2009) où 50% des communications seraient émotionnelles et 25% seraient des états en fonction des actions. Ces deux types de communications seraient significatifs d’une communication efficace. En revanche, les communications focalisées sur l’exécution (par exemple : « frappe le volant plus tôt ») seraient significatives d’une communication peu efficace. D’autre part, les dyades gagnantes exprimeraient deux fois plus de messages que les dyades perdantes. Les dyades gagnantes utiliseraient plus la communication non-verbale même si celle-ci a été peu quantifiée. Les dyades gagnantes auraient également un modèle de communication plus homogène que les dyades perdantes, ce qui leur permettrait de mieux se comprendre et d’interpréter les messages. De plus, les dyades gagnantes planifieraient plus l’action future que les dyades perdantes ce qui leur permettrait notamment de mieux gérer les conditions de jeu (courant d’air, type de volant, nervosité de l’un des adversaires etc…).

Conclusion

L’expertise en communication est une habileté commune à tous les acteurs de la performance dans le domaine du sport. Mais tous n’ont pas forcément investigué ce champ de connaissances. Pourtant, cette expertise est d’autant plus importante en badminton qu’elle est autorisée en compétition et même au cours du match. S’Il apparait évident de travailler à l’entraînement la communication joueur-joueur dans une paire de double, Il devrait en être de même pour la communication entraîneur-joueur. De plus, Il n’y a pas un bon coach pour les joueurs de badminton mais un bon coach pour un joueur de badminton. L’entraîneur devrait donc s’entraîner à adapter ses manières de communiquer en fonction de ses joueurs et des situations. De même, l’expertise du joueur en matière de communication doit être travaillée aussi bien que celle de l’entraîneur. Si dans tous les domaines, le joueur doit être acteur de sa performance et de son entraînement, cela est encore plus vrai en matière de communication. Le titre de ce Dossier BAD aurait donc dû être : la communication entraîneur-joueur et joueur-entraîneur en compétition. Vous l’aurez compris, le principe fondamental reste, à mon sens, l’individualisation dans tous les domaines : coaching, préparation physique, entraînement,… d’autant plus lorsqu’on recherche la performance du joueur dans le respect de son intégrité physique et psychologique.

Bon entraînement intelligent à tous !

 

Maxime Michel
DESJEPS Badminton
Préparateur physique

Philippe Michel
Professeur Agrégé EPS

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