Dossier bad 27 : La technique au service de la créativité
La culture des techniques au service de la créativité
LA technique existe-t-elle en badminton ? Celle qui résoudrait tous les problèmes. Elle permettrait, entre autres, de fixer-varier avec efficacité contre tous les adversaires et pourquoi pas, dans toutes les disciplines.
Pour tous ceux qui croient dans une technique idéale, je propose une mise en perspective historique. A quand daterait-il l’apparition de la technique idéale ? La technique idéale était-elle la même il y a 30 ans ? Sera-t-elle la même dans 30 ans ? Même à supposer que le matériel et les règles n’évoluent pas d’ici là, il est présomptueux de croire que les joueurs sont au maximum des possibilités humaines en badminton. Cela repose sur la difficulté que les hommes ont à imaginer que leurs successeurs fassent mieux qu’eux, voire qu’ils fassent mieux en faisant différemment. En tout état de fait, croire dans une technique idéale et donner des conseils techniques basés sur cette croyance témoignent d’une pensée figée dans le temps.
A ces arguments, il n’est pas rare d’y voir opposer « les principes biomécaniques » : « la bonne technique repose sur les principes biomécaniques ». Des principes biomécaniques ont été découverts pour la frappe fond de court notamment grâce à des études longitudinales qui ont comparé le smash avec le stick ainsi que le « stick 100% ». Je me demande si les croyants dans la technique idéale pourraient deviner ces principes tellement ils sont surprenants et lourds d’enseignement notamment sur notre ignorance. Pour ce qui est des frappes main basse telles que les spins, les contre-amorti croisés, les entrejeux main basse ou encore les défenses, je me demande là encore, si les tenants de la technique idéale pourraient présenter les études définissant ses principes biomécaniques sur la base de calculs opérés sur un panel représentatif de joueurs de haut niveau.
Ne nous hasardons pas à inventer des connaissances. Acceptons de ne pas savoir. Acceptons la complexité de notre activité plutôt que de la réduire à la simplification dont notre cerveau ne peut se passer pour expliquer, voire se rassurer.
Une fois l’étape de l’acceptation de ne pas tout savoir acquise (étape qui peut ne jamais être franchie), l’entraîneur-maître devient l’entraîneur-guide. Il passe des certitudes aux hypothèses. Il était un entraîneur sachant (alors qu’en réalité il était croyant) à un entraîneur chercheur. Il sera sans cesse en quête de nouvelles techniques et manières de faire pour enrichir sa culture du badminton. Plus sa culture sera grande, plus il pourra la transmettre à ses joueurs dans le but d’inspirer leur créativité. L’ouverture d’esprit de l’entraîneur vis-à-vis du champ des possibles « technique » garantit au joueur une grande liberté de chercher et trouver des solutions originales. Le seul point de repère étant le caractère limitant d’une technique dans le développement futur du joueur. L’entraîneur alimente la créativité technique du joueur tout en veillant à l’efficience et évalue leur pertinence future. Au lieu de disposer d’une grille de lecture fermée qui ramène sans cesse les joueurs à des préceptes pré-établis, l’entraîneur fait évoluer ses observables. Ainsi, il lutte sans relâche contre l’obsolescence. Bref, il fait son travail.
La mode, malheureusement, est à la recherche d’entraîneur sachant (traduisez croyant). Le jusque boutisme de cette mode et de cette pensée voudrait que les sachants seraient ceux qui ont « l’expérience ». La contradiction est entière. Mais la connaissance est à l’expérience ce que le vocabulaire est à la lecture… Indispensable à la compréhension. Penser que l’on connait LA technique revient à donner la preuve que l’on ignore les bases des théories de l’apprentissage et de la généalogie des techniques. Comprenez qu’il faut apprendre, pour découvrir que la clé est de chercher indéfiniment.
Maxime MICHEL
DESJEPS Badminton
Entraîneur Salbris
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